Haro sur le MoDem

                  

L’UMP sort regonflée des élections européennes, et veut le faire savoir　: accélération des réformes, présence amplifiée d’un chef de l’Etat déjà omniprésent, remaniement à venir avec en prime l’arrivée probable de têtes parmi les perdants, surtout les perdants dangereux, afin d’enfoncer encore plus le clou de la revendication. Le rouleau compresseur Sarkozien est en route, et avec lui la stratégie muselière, qui quoique on en dise, reste bien dans le cadre légitime de la démocratie, car même si elle est axée sur le bon vouloir du prince suzerain, aucun des féodaux vassaux n’est obligé d’accepter les cadeaux. Mais cette pratique médiévale a déjà fait ses preuves et notre président n’est pas sans le savoir. Le président entend ainsi éclaircir son horizon politique et diminuer progressivement les embûches en vue d’une réélection qui ne dit pas encore son nom. Patience et longueur de temps font plus que force et que rage, La Fontaine en observateur averti, a su en son temps bien étudier le phénomène.

Hervé Morin, tête de liste du nouveau centre incarne bien ce type de vassal inféodé, mais il n’est pas présidentiable, il n’en a pas la carrure, et son parti ne peut être que amarré de ce fait à celui qui en a.

Le nouveau centre et les centristes regonflés, comme l’UMP, en appelle à la création d’un nouveau parti avec centristes de tout poil, et MoDem (sous-entendu MoDem déçus par François Bayrou). Jean Arthuis, ancien ministre et sénateur, certes une autre compétence que Morin, ne fait pas dans la dentelle en lançant cet appel auprès des sympathisants du Centre　en vue des régionales　: un nouveau nouveau Centre　? Il faut anéantir ce MoDem rebelle qui ose encore exister malgré son échec électoral. Le temps compte, il faut aller vite quand tout reste encore frais dans l’esprit des gens. (c’est pour le 27 juin) Mais Jean Arthuis, malgré ses atouts, n’est pas non plus présidentiable, et l’existence de ce nouveau parti n’est prévue que pour appuyer encore et encore le suzerain glorieux. Sur son site le sénateur de Mayenne annonce qu’il reste fidèle à l’esprit de l’UDF, et on connaît la suite.

Daniel Cohn-Bendit n’a certes rien d’un vassal inféodé, mais sa stratégie de haro sur le MoDem a fait l’affaire de Sarkozy. Relookés, et regonflés, les Verts qui n’ont pas non plus de présidentiable se mettent à rêver à d’autres horizons plus prometteurs, en annonçant déjà leur indépendance. Mais ils n’ont pas l’apanage de l’écologie, et celle-ci à elle seule ne peut définir un projet de société, mais doit être intégrée à celui-ci. Les gesticulations de l’ex-soixante-huitard suffisent-elles à porter ce projet　? L’avenir nous le dira, car la Gauche socialiste vient de prendre conscience de ses graves lacunes en la matière. Au MoDem, Corinne Le Page et le cap 21 incarnent déjà cette façade verte indispensable à tout parti qui aspire à d’autres prétentions.

L’existence d’un parti du centre indépendant peine encore à exister politiquement sans être phagocyté par les grandes forces. Pourtant son espace est réel et son programme porte en lui des valeurs de démocratie et d’humanisme. Gageons que les élus démocrates au parlement européen, sauront intégrer ce message dans leurs projets.

La démocratie doit toujours pouvoir s’exprimer dans une offre politique plurielle et ouverte sur la société.

Marie Pierre Prigent